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Raekwon – Shaolin VS Wu-Tang (2011)

Le succès est trop court pour ne pas en profiter surtout quand on fait partie de la catégorie fossile sur le retour. Du haut de ses 40 ans, Raekwon aura connu plus de succès en deux ans suite à la sortie de son OB4CL part II qu’en 6 ans de traversée du désert suite à la sortie de The Lex Diamond Story. Si le OB4CL part II ne peut se comparer au premier du nom compte tenu de la différence générationnelle, ce retour au premier plan reste justifier par un album qualitativement supérieur à ce que la scène musicale du rap est capable de livrer mais surtout, Raekwon avait su raviver la flamme d’une touche Wu Tang aux abonnés absents. Alors que faire de cette exposition ? Continuer sur le même modèle en délivrant un album de qualité qui revient à un investissement humain/temps conséquent ou surfer sur la vague en inondant de sa présence musicale tout les supports, quitte à se vendre sur des featuring plus que douteux avec des produits formatés à la Justin Bieber ? A 40 ans, la réponse semble naturelle : faire du pognon et donc lâcher un produit de seconde zone nommée Shaolin VS Wu-Tang.

 Avec à peu près 30 000 copies vendues dès la première semaine (soit 2 fois moins que pour OB4CL part 2), on pourrait penser que la stratégie du Raekwon est un semi échec, échec en comparaison des ventes du précédent album mais succès compte tenu de son étiquette « underground ».  Après écoute de ce Shaolin VS Wu-Tang, on comprend de suite que la stratégie a été payante : avec des instrus pauvres et sûrement peu chères, un investissement lyrical au ras des pâquerettes, Raekwon réalise un hold-up des plus impressionnants. 
 Question instru, la ligne de conduite était assez simple à tenir vue l’appellation de la galette mais la vraie problématique était de retrouver l’ambiance Wu-Tang sans son chef d’orchestre  RZA. Et là, dans le genre, on a droit à quelques perles qui frisent limite le pastiche. Dans le genre, le gardien de l’identité de Stones Throw, Oh No livre une espèce d’épopée avant-gardiste sans saveur agrémentée de bruitage de tout genre, ajouté au flow usé ou plutôt au discours de Raekwon, cet Every Soldier in The Hood est plus proche de la berceuse que de l’hymne guerrier. Seul rayon de soleil : le retour d’outre tombe de Method Man qui remet ça sur From The Hills mais malheureusement le côté guimauve du hook combiné à une instru des plus médiocres n’est pas à la mesure de son engagement. On s’étonnera de ne pas entendre la voix de l’homme au flow d’asthmatique sur Molasses, préféré à un flow qui sent bon l’AVC à chaque fin de verse de Rick Ross (prévoir un défibrillateur pour l’enregistrement de son prochain album). Etonné par la présence de l’ex-maton ? Pourtant on vous l’a dit on est là pour faire du fric et s’il faut baisser son froc pour quelques dollars de plus, il n’y a qu’à demander.
Pour le reste, il ne suffit pas de s’aventurer en deuxième partie du cd pour trouver les fameux filers puisque, dès la quatrième piste l’impensable se produit : Chop Chop Ninja où tel un film de fight de série b sans budget, les acteurs (Rae, Inspectah Deck et Estelle) enchaînent une chorégraphie des plus laborieuses ponctuée par une bande son réalisée à la bouche pour donner une touche supplémentaire de ridicule à la situation. Mais s’il y a bien un producteur qui mérite tous nos compliments c’est Scram Jones : membre de la liste très fournie des beatmakers lambda, le petit chouchou de The Source bénéficie d’une exposition enviable, pourtant avec l’enchaînement Shaolin Vs Wu Tang (irritant au possible), Crane Style (aussi plat en émotion qu’un film dramatique vietnamien) et Last trip To Scotland (plus accessible mais l’ajout de Banks finit de pourrir la track) ressemblent à une imitation plus que vulgaire de l’héritage musical de RZA (et que dire ces ajouts de bruitage grossier ?). On aura beau essayé de se rabattre sur une prod estampillée Wu Tang de Mathematics, là encore il ne reste que nos yeux pour pleurer à l’écoute de Dart School. Et puis Tony Nova, le petit protégé de Raekwon qui par ses différentes mixtapes et apparitions suscite un intérêt tout à fait légitime mais malheureusement, pour la confirmation, il faudra repasser tellement le sample peu travaillé fait directement penser à Ennio Morricone.
Le travail carré fourni sur le OB4CL part II avait occulté le flow très border line de Raekwon, sur ce nouvel opus, il est clair que l’on ne peut plus fermer les yeux : Raekwon ne suit plus la distance au micro. La qualité des productions délivrées tout le long de cet album ne font que desservir le Chef qui accumule off beat et essoufflement (voir une espèce de slow flow qui s’apparente plus à un discours  qu’à du rap). Et histoire d’enfoncer le clou, les invités l’assomment pour de bon, créant une certaine gêne comme NaS sur Rich And Black transformant une belle affiche en une prestation complètement invisible son hôte (même modus operandi que sur With You de CNN et Dog Shit des Mobb Deep).
N’y a-t-il rien à sauver ? Si et comme dirait mémé c’est dans les vieux pots que l’on fait les meilleures soupes donc pour rechercher une ambiance dark agrémentée de l’univers shaolin, il suffisait de demander au dernier bambou qui plie mais ne rompt pas : Bronze Nazareh, et comme par magie Raekwon retrouve des couleurs, fini le flow paresseux, retour de l’assassin qui sort l’arme blanche pour une exécution digne d’un professionnel. Pour une ballade nocturne et sanglante sur le ferry reliant Manhattan à Staten Island, demandez à ALC de lâcher quelques temps son trip Gangrene et de revenir à ses fondamentaux. Le résultat est à la hauteur de sa réputation, Ferry Boat Killaz est de ce genre d’ambiance oppressante où l’environnement musical plonge l’auditeur dans l’angoisse et où le flow pointu comme un bris de verre vient se planter dans les oreilles.
Raekwon cache bien son jeu. Alors qu’en interview, on se questionne sur sa capacité de réflexion générale, il n’en va pas de même quand il faut presser le citron jusqu’à plus gouttes.  Et cela avec le consentement des médias spécialisés qui ne se questionnent même plus sur  la légitimité du nouvel entourage que le quadragénaire s’est créé (critique à minima vue que l’album est encensé sans bémol). Car ambigüité il y a et pas qu’un peu, si Raekwon peut se vanter d’être une des figures les plus emblématiques du Wu et d’une certaine vision du rap, ses dernières frasques (en compagnie de Kanye West sur le single de Bieber ainsi que la présence de Rick Ross sur ce dernier opus) sont très loin de passer inaperçues. Shaolin Vs Wu Tang résume très bien l’attitude de Raekwon actuellement, le cul entre deux chaises, le mc livre un album qui ne contentera que son banquier tout en froissant sans retenue les fans de la première heure. Pour la partie musicale, le brouillard est vraiment trop compact pour y déceler un paysage artistique…
9/20
Raekwon – Shaolin VS Wu-Tang (2011)
1 vote(s)

3 comments on “Raekwon – Shaolin VS Wu-Tang (2011)

  1. SnowgoonS on said:

    Comme j'aime quand tu prends un skeud tout pété pour te défouler dessus… c'est juste énorme…Sinon album sans intérêt

  2. Drill on said:

    ça permet de décompresser mais bon j'ai fait la kro surtout parce que ça m'énervait de voir que des louanges sur cet album sur les autres sites de review, y a un moment où faut savoir prendre du recul même quand l'artiste fait parti des meubles du HH

  3. Crazy Horus on said:

    Abusé comment je n'ai rien retenu de ce skeud. Le Chef avait relevé son niveau sur OB4CL2 malgré un flow méga chiant mais là on touche clairement le fond. Très loin maintenant cet album et j'en n'attendais pas grand chose au vu des extraits qui ont filtré. Au final une belle daube. Raekwon n'est que l'ombre de lui même depuis quelques années (alors qu'il est l'un des MC les plus invités en feat…).

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